La confiance, qu’est-ce que c’est ?

Table des matières

Définitions, théories et cadre de la confiance

Georges Simmel explique que la confiance est une des forces de synthèse les plus importantes dans la société.  Cette déclaration définit les axes de réflexions pour comprendre ce qu’est la confiance et ses enjeux dans la société. A ce jour, il n’existe pas une définition universelle capable d’expliquer ce concept dans son intégralité. Malgré cette ambiguïté, dans la conscience commune, cela paraît évident que d’un côté, la confiance est fondamentale dans la vie personnelle (confiance en soi), relationnelle (amitié, couple, famille), professionnelle et en société.

D’un autre côté, elle possède sa part dangereuse car elle peut engendrer des risques comme la déception que la personne à qui on l’accorde ne soit pas à la hauteur des attentes, la trahison en l’accordant à une personne qui ne la respecte pas de manière délibérée.

Dans ce constat, le sociologue Luhman¹ (1960) a déclaré que «la confiance est un simplificateur de la complexité humaine».

Alors qu’est-ce que la confiance ?

Étymologiquement, la confiance vient du terme cum fidere qui signifie « se fier à ».

 Elle établit alors l’acte de s’appuyer sur quelqu’un ou quelque chose. En ce sens, la confiance se rapproche du concept de la foi dans la religion et la dépendance qu’elle applique apportant une stabilité dans un avenir incertain.

Cette incertitude se retrouve dans des besoins personnels ou sociaux comme compter sur soi ou sur les autres, prévoir les comportements, avoir des points de repères, maîtriser le futur. Ces aspirations ont induit à la création de nombreuses formalisations et régularisations, comme les contrats ou les promesses. Ces moyens peuvent inciter l’engagement envers autrui car ce sont ceux qui se rapprochent le plus de la maîtrise de ces idéaux parce qu’ils impliquent une réciprocité.

Le philosophe Hume² explique que « être loyal et honorer ses promesses représente une véritable obligation : celui qui promet se lie à l’avance et s’engage à répondre de ses actions dans le futur ; en promettant, il accepte implicitement qu’on lui demande des comptes plus tard sur la manière dont il aura réalisé sa promesse ; il donne sa parole à quelqu’un d’autre et contracte, par-là, une certaine obligation en autorisant autrui, par la suite, à exiger de lui des actions, des conduites, des prestations. En disant « je promets », non seulement j’invite autrui à me faire confiance, mais je l’invite aussi à ruiner ma réputation si je manque à ce que j’ai promis ».

En se matérialisant par une promesse ou un contrat envers un « autre », la confiance est intimement liée avec le concept du choix. Accorder sa confiance se fait avec une attente d’un retour avantageux pour soi ; donc selon les informations sur l’autre, on choisit de faire confiance que parce que ça pourrait engendrer des avantages pour soi. Ce choix de la confiance ou non s’apparente à un calcul rationnel ou « un niveau de probabilité subjective ». C’est ce calcul qui permet de croire que l’autre accomplira ce qu’il lui a été demandé.

Dans ce sens alors la confiance est le fait d’envisager la possibilité d’une coopération.

Le sociologue Russel Hardin³ (2004) avance une théorie sur le croisement des intérêts qui engendre la confiance : « je fais confiance à quelqu’un si j’ai des raisons de croire qu’il sera dans l’intérêt de cette personne de se montrer digne de confiance, de manière appropriée et au moment opportun. Ma confiance repose alors sur le fait que mes propres intérêts sont enchâssés dans les intérêts de l’autre : elle dépend du fait que le bénéficiaire de ma confiance conçoit mes intérêts comme étant partiellement les siens ».

Cet aspect rationnel de la confiance peut s’appliquer dans un travail d’équipe ou une collaboration.

Exemple

Durant les travaux collectifs et collaboratifs d’Activ’Action qui se base sur le partage constant. En gardant un lien et en s’ouvrant à l’autre en toute transparence, sans jugement, honnêteté et réciprocité, cela permet d’instaurer un cadre de sécurité pour permettre à chacun de se dépasser, gérer les incertitudes ensemble et de se sentir légitime. Notre rapport avec l’expérience aux autres peut nous influencer positivement. Ce cadre permet d’instaurer une stabilité et un travail collaboratif efficace.

Définitions, théories et cadre de la confiance

Pourtant même si on applique cette théorie d’enchâssement des intérêts pour émettre un choix de faire confiance en quelqu’un, quelque chose ou soi-même, il n’est jamais certain que ce choix soit le bon ou non.

Cette incertitude émane de la difficulté à pouvoir, aux premiers abords, savoir s’il y a une coïncidence entre :

  • La confiance que l’on porte envers quelqu’un (avec la dépendance qu’elle implique),
  • Le sentiment de pouvoir compter sur cette personne (la reliance),
  • La fiabilité de celle-ci par rapport aux compétences morales (la sympathie, la bienveillance…) et techniques (connaissances, savoir-faire…).

La différence entre ces trois facteurs est essentielle pour comprendre les différents degrés de lien que l’on a envers une personne. Lorsque la fiabilité d’une personne aura été établie (selon nos propres critères), il est concevable qu’on puisse compter sur elle mais s’il ne répond pas à nos attentes ce n’est pas pour autant qu’il y a forcément un sentiment de trahison. Pareil si on constate que si une personne n’est pas fiable et qu’on ne peut pas compter sur lui, qu’on se sente trahi ou qu’on continue à avoir confiance en elle.

Ces trois niveaux sont alors en continuité pour établir un véritable lien de confiance et avantageuse pour soi.

Selon Lars Hertzberg⁵, il y a une différence entre compter sur une personne fiable et la confiance qu’on fait ou donne à une personne sans prendre en compte ses compétences.

En se posant les bonnes questions sur chacun de ces points comme est ce que l’autre (soi-même, les collègues, l’organisme, la société) est fiable ? Est-ce qu’on peut compter sur lui ? Est qu’on prêt à accorder une confiance en lui et être dépendant de ses actions ?

Exemple

Durant les travaux collaboratifs sur la confiance à Activ’Action, plusieurs éléments ont été évoqué, pour permettre de donner des critères et répondre à ces questions, comme :

  • La bienveillance ;
  • La curiosité envers autrui ;
  • La gentillesse et la sérénité qu’elle dégage (un sourire, des gestes, la posture, le ton, attitude) ;
  • L’attention portée aux autres : prise en compte de la communication non-verbale et communication verbale qui renforce le rapport empathique ;
  • Les valeurs similaires ou des valeurs authentiques ;
  • La sincérité, l’honnêteté (aussi intellectuelle) et la transparence ;
  • Le respect du cadre de non jugement : cadre convivial et sentiment de sécurité ;
  • La réciprocité et une confiance mutuelle ;
  • La fiabilité à travers les avis d’autres personnes, son histoire, la cohérence de ses actes/paroles ;
  • L’ouverture aux autres ;
  • La confiance que la personne a envers moi ;
  • Les échanges, l’horizontalité, le partage ;
  • L’humilité ;
  • Un but et vision commune malgré les différences ;
  • L’instinct et l’intuition ;
  • L’éducation et l’expérience ;
  • S’adapter, tester, observer, expérimenter, anticiper ;
  • Le temps.

  L’importance de ces critères varie selon la subjectivité de l’individu qui cherche à accorder sa confiance à quelqu’un ou quelque chose. Durant le séminaire d’équipe de décembre 2020 à Activ’Action, la confiance en un collègue avec qui on travaille directement ou non peut être déterminée par certains points importants aux membres de l’équipe.

Avec un collègue avec qui l’on travaille directement

Différents éléments nous donnent confiance, parmi eux nous avons :

Liens de causalité chômage, santé et facteur externe

Elle se construit au fur et à mesure des expériences vécues avec la personne

La personnalité de la personne

L’honnêteté, la transparence, la sincérité (cohérence entre acte et parole), l’équité, des valeurs similaires aux siennes et l’ouverture à l’autre (partager son quotidien en sachant que l’on peut compter les uns sur les autres)

Le cadre de travail

Une appétence pour le travail en équipe que ce soit les victoires ou les torts en sachant revenir dessus, se laisser un droit à l’erreur tout en ayant en tête une co-responsabilité.

Des feedbacks, recommandations, qu’ils soient positifs ou négatifs, objectifs de manière bienveillante pour s’aguiller.

Avec un collègue avec qui l’on ne travaille pas directement

Lorsque nous ne travaillons pas forcément avec la personne, nous avons :

La relation avec le temps

Aussi au travers des expériences mais elle demandera plus d’effort et d’étapes pour se construire. Il est difficile pour certain de dépasser un certain seuil de confiance sans travailler avec la personne. Cela passe par soi-même, par le travail et par l’autre personne.

L’adaptabilité

Elle se fait en fonction du ressenti à travers les échanges pour voir si on se sent à l’aise, connaître sa personnalité et aussi en fonction du choix des recruteurs (j’ai confiance en les recruteurs donc j’ai confiance en l’équipe en général) pour s’adapter en fonction.

La personnalité

Une personne à l’écoute, souriante, ayant une posture calme et des valeurs similaires, proactive, disponible, impliquée et qui respecte le cadre de non jugement et le cadre commun.

De nature à s’ouvrir et s’intéresser aux autres et partager des moments informels.

Le cadre de travail

Une communication claire qui facilite l’apprentissage et permet de voir que la personne est dans son rôle, respecte ses engagements.

Des temps d’intégrations pour avoir des moments informels et mieux connaître la personne (comme de temps de travail ensemble) et ainsi savoir comment s’aider et mieux comprendre le fonctionnement.

Le pari de la confiance

Grâce à ce schéma, on peut avoir des éléments constitutifs permettant de comprendre la rationalité de la confiance (évoquée précédemment).  Malgré tout ça, la confiance ne dépend pas seulement de notre bon vouloir. On ne peut pas le quantifier et encore moins être exigé.

 La confiance ou la non-confiance se fait avec des degrés variés de conscience.

La philosophe Annette Baier⁶ (1986) écrit que « quand je fais confiance à quelqu’un, je dépends de sa bonne volonté à mon égard, je n’ai besoin ni de la reconnaître ni de croire que quelqu’un l’ait sollicitée ou reconnue, car il y a des choses comme la confiance inconsciente, la confiance non voulue, ou encore la confiance dont celui en qui on a confiance n’est pas consciente ».

C’est ce qui explique que l’on peut avoir un sentiment de confiance ou non dès le premier instant avec quelqu’un ou quelque chose.

 Cette dimension inexplicable s’apparente plus à un pari ou “un saut dans le vide” parce qu’on ne peut pas maîtriser tous les éléments étant donné qu’il y a le croisement entre dépendance et fragilité avec lequel se mêle une possibilité de transformation de soi-même.

Exemple

Durant le séminaire, les membres de l’équipe ont évoqué l’impact que peut avoir la confiance envers soi ou autre dans le travail collaboratif que ce soit dans :

Rapport personnel

  • Le fait de maîtriser le sujet, les choses et ainsi être à l’aise dans ce que l’on fait, avoir anticipé les conséquences de ses actions et être sûre ;

  • Le fait d’apprendre quotidiennement, de tester, de pratiquer, de voir des résultats progressivement dans le temps et d’accumuler des réussite ;

  • La capacité de s’adapter, être autonome, d’être résilient et de prendre plaisir pour appréhender les choses ;

  • La confiance en soi et l’envie de transmettre, l’enthousiasme et savoir que l’on peut aider une autre personne ;

  • La prise de recul à la fin d’une mission, la fierté d’avoir réalisé des objectifs de plus en plus élevés ;

  • Le fait de se connaître mieux soi-même.

Rapport avec notre environnement

  • Le fait d’avoir des retours de la part de collègues, familles, référents, partenaires et se sentir soutenu et écouté ;

  • Le fait d’avoir un environnement convivial (propice aux tests) face à un environnement avec un gros enjeu (stress et pression) ;

  • Le fait que des personnes aient confiance en nous, nous redonne confiance mais cela peut aussi en faire une pression car nous avons peur de décevoir et nous nous surpassons pour devenir légitime : il y a un besoin de reconnaissance ;

  • Les résultats attendus pour un projet ou l’impact recherché nous donne confiance pour la suite et notre leadership ;

  • L’impact positif qu’une personne peut avoir sur nous et donc notre relation avec les autres ;

  • Au niveau du leadership, le cadre de non jugement/expérimentation ou bien voir qu’il y a la place de pouvoir proposer des choses nous permet d’avoir confiance et de proposer des solutions quand le besoin se fait sentir. Le leadership est aussi l’occasion de rechercher une certaine horizontalité.

     

     Ce séminaire a permis de confirmer un point essentiel sur la confiance : son impact. Elle apporte un rapport au temps et surtout par rapport à l’avenir. Elle peut donner la possibilité de croire que tout est ouvert (son environnement, le rapport avec les autres ou à soi)⁷.

    En effet face aux nombreux risques dans le quotidien ou dans le travail, l’illusion de croire que l’on peut tout maîtriser, qui aujourd’hui est reprochée aux personnes qui n’arrivent pas à le faire, mais aussi l’apparition des événements inattendus crée un sentiment de peur qui s’exprime par une paralysie sociale (s’enfermer sur soi ou rester dans son monde) où rien de négatif ne peut arriver. Pourtant ce mécanisme de défense, qui s’autoalimente, engendre une angoisse encore plus grande et une peur de plus en plus importante.

     Cette situation de paralysie peut trouver sa solution dans la confiance. 

    Le seul fait d’avoir confiance en quelqu’un implique que le bénéficiaire de celle-ci peut exercer un pouvoir sur nous ce qui implique forcément une ouverture à ce qui nous entoure ou l’environnement dans lequel on se trouve et de contourner les obstacles.

     Avoir confiance, “c’est admettre la possibilité du changement, de la trahison, du revirement” car la confiance humaine porte en elle le germe de la trahison. Elle tient sa force dans la faiblesse et les défaillances de chacun.

En ce sens, la confiance et la trahison sont intimement liées. « Non seulement la confiance que je peux avoir en un autre n’exclut pas la possibilité que celui-ci me trahisse, mais c’est aussi justement parce que j’ai confiance en quelqu’un que je peux être trahi par celui-ci ». Ce fait ne signifie pas que l’on pourra trouver une personne qui ne nous décevra pas ou que l’on ne sera pas capable de décevoir mais d’accepter tous les éléments qui font nos forces ou nos faiblesses et de travailler en équipe. C’est en ce sens que la confiance est un simplificateur de la complexité humaine⁸.

Elle permet alors de créer une base collaborative pour les travaux, les séminaires, de développer l’esprit d’équipe et d’entamer une transformation de soi.

Conclusion

Ce saut dans le vide, qu’est la confiance et ce qu’importe le cadre, est une construction qui nécessite du temps. Elle peut être faite et défaite. C’est un lien qui puise sa force dans le fait que même si elle demeure à jamais fragile, elle engendre toujours du lien.

Sources

¹ Niklas Luhmann, La Confiance. Un mécanisme de réduction de la complexité sociale, Economica [1973]

² David Hume, Enquête sur les principes de la morale [1751]

³ Russel Hardin, Trust and trustworthiness, 2004

⁴ Michel Marzano, Qu’est-ce que la confiance. Études, 2020, tome 412, pages 53 à 63

⁵ Lars Hertzberg, « On the Attitude of Trust », Inquiry, 31, 3, 1988, cité par L. Quéré, « Confiance et engagement », dans A. Ogien, L. Quéré (éd.), Les Moments de la confiance, op. cit., p. 137

⁶ Annette Baier, Ethics, Vol. 96, No. 2 (Jan., 1986), pp. 231-260 (30 pages), The University of Chicago Press

⁷ Michel Marzano, Qu’est-ce que la confiance. Études, 2020, tome 412, pages 53 à 63

⁸ Michel Marzano, Qu’est-ce que la confiance. Études, 2020, tome 412, pages 53 à 63

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